Exposé : Rêve et Imaginaire par Anna et Capucine (TL2)
Introduction :
Les
Mains libres est un recueil de Man
Ray et Paul Eluard qui paraît en 1937. Il a la particularité d'être constitué
de dessins illustrés de poèmes. Les mains libres un recueil prototype du surréalisme, qui
refuse les catégories esthétiques et semble prononcer une révolution littéraire
sans se fixer de règles, et utiliser les schémas poétiques convenus. Pierre
Janet (médecin, philosophe français qui a crée le terme
« subconscient » a dit : « Le manifeste des surréalistes comprend
une introduction philosophique intéressante. Les surréalistes soutiennent que
la réalité est laide par définition ; la beauté n'existe que dans ce qui n'est
pas réel. C'est l'homme qui a introduit la beauté dans le monde. Pour produire
du beau, il faut s'écarter le plus possible de la réalité. Les ouvrages de
surréalistes sont surtout des confessions d'obsédés et de douteurs. » Cette
phrase a été citée par André Breton dans Second
manifeste du surréalisme en 1930. On comprend alors que les dessins et les
poèmes font référence au rêve et à
l’activité inconsciente car la recherche de la beauté s'écarte le plus possible
de la réalité.
I/ Les mains
libres, incitation à la rêverie
Les mains libres
est une incitation à la rêverie, en effet l’association des dessins et poèmes
font références aux rêves et à l'activité inconsciente mais montrent aussi la
volonté d’échapper à la réalité, aux règles traditionnelles. Paul Eluard et Man
Ray semblent eux même faire communiquer leurs deux arts par le rêve. Man Ray a
dit « le matin quand je me réveille, si j’ai fait un rêve, je le dessine
tout de suite. Beaucoup des dessins des Mains libres sont des dessins de
rêve », les deux artistes veulent donc à travers ce recueil faire parler
leurs fantasmes, traduire leurs rêves car, pour Eluad, le rêve lui permet
d'aller « au delà de cette réalité insensible à laquelle, on voudrait que
nous nous résignons [il] fait entrer de plein pied dans un monde où nous
consentons à tout, où rien n'est incompréhensible ». Leurs expériences
oniriques sont bien évidemment différentes, mais se rejoignent dans ce recueil.
La poésie d'Eluard ainsi
que les dessins de Man Ray permettent la promotion de l'irrationnel, dans la
mesure où ils expriment des éléments comme le sommeil, le rêve, l'inconscient,
le merveilleux, l'insolite et le hasard qui amène le lecteur dans une situation
d'attente et d'écoute. En effet, leur recueil échappe à la raison et aux règles
conventionnelles d'un langage clair et logique, ils ont voulu retranscrire
l'activité inconsciente qui se fait de plusieurs manières.
Pour Eluard, l'expression
de l'activité inconsciente passe par l’écriture automatique qui entraîne la libre
association de mots car c’est un moyen de libération et de révolution qui
ne se préoccupe pas des conditions esthétique ou morale
ou encore de la cohérence [lire le poème] → La lecture (p28). Dans ce
poème nous ne voyons pas vraiment de cadre logique, son écriture paraît libre
puisqu’il n’y a pas vraiment de cohérence entre les mots ou les vers, il
fonctionne beaucoup par métaphores. Cela laisse au lecteur la liberté de
trouver, comprendre, imaginer les liens entre ces mots, leurs donner du sens.
Pour Man Ray,
cela passe tout d’abord par l’utilisation du noir et blanc, ce qui
laisse plus de liberté à notre imagination. Nous pouvons également remarquer
que les lignes ne se referment pas. Les lignes des corps des femmes ne
sont souvent pas terminées, laissant ainsi au lecteur l’imagination de son
prolongement. (Ex p34/66/69)
L'absence
de détails est aussi un
caractère de l’expression du rêve, les dessins de Man Ray sont très simplifiés
il dit « il n’y a pas de détails dans les cheveux, alors pas de détails
dans les yeux non plus, mais il y a juste assez pour que l’on comprenne ce que
c’est et donner l’expression du visage ». L’absence de détail est donc
fait pour ne pas que le lecteur se focalise dessus, et surtout pour lui laisser
la possibilité de les imaginer, de les rêver. (Ex p18/38/84/130)
Une autre
particularité, celle de l’absence de fond sur tous les dessins. Chaque
personnage, chaque objet sont représentés sur une toile blanche, ce qui fait
référence au monde du rêve, ils semblent flotter hors du temps, dans un monde
parallèle. (Ex p13/26)
Il est
impératif de rappeler que les dessins et les poèmes sont indépendants, ils
fonctionnent librement puisque les poèmes d’Eluard ne sont pas là pour
expliquer les dessins. Eluard à dit « Des images n'accompagnent un poème
que pour en élargir le sens, en dénouer la forme […]. Pour collaborer, peintre
et poète se veulent libres. La dépendance abaisse, empêche de comprendre,
d'aimer. Il n'y a pas de modèle pour qui cherche ce qu'il n'a jamais vu. A la
fin rien n'est plus beau qu'une ressemblance involontaire. ». Le but du
poète est plutôt d’exprimer sa propre vision onirique à partir des dessins.
Cette double création envoie alors les lecteurs dans une autre dimension, celle
du rêve et l’imaginaire, car l’expérience onirique de ces deux artistes n’est
pas forcement compris de la même manière par tout le monde. Notre rôle est donc
de créer nos propres images à partir de celles proposées par les deux artistes.
Chacun est libre d’interpréter, d’imaginer et de rêver les dessins de Man Ray
et les poèmes d’Eluard.
II/ Analyse
de poèmes
Analyse de L’aventure
(p31)
Dessin → On voit une femme en longue robe, elle se
cache les yeux comme pour se protéger de quelque chose, lumière aveuglante
peut-être, sable, poussière ?
Les lignes sont ondulantes,
indécises.
Le cadre fait penser à un
paysage grec, on aperçoit le haut d’un temple qui n’est relié, fixé à rien, que
rien ne semble retenir. La femme, en dessous semble d’ailleurs s’en éloigné
comme pour s’en libérer, se libérer d’une tension qui la menace. Man Ray semble
avoir voulu représenter le moment d’un départ hésitant. Un sentiment de menace,
de tension se dégage de ce dessin.
Poème (A LIRE) → Le poème d’Eluard présente quelques
différences par rapport au dessin de Man Ray, en effet, si la femme paraît
hésitante, le poème, lui encourage la découverte de l’inconnu. Le mode de
l’impératif « bats la campagne, répands tes mains, connais la terre de ton
cœur » exprime la vivacité, l’énergie et surtout l’intensité d’un certain
désir de découverte. Le poème exprime, à l’inverse de la tension et de la
menace, la facilité à franchir l’inconnu, à accéder à la lumière, à un monde
merveilleux.
Interprétation des deux ->
sensation oppressante, il faut briser les obstacles de l’immobilisme, il faut se créer un espace, qui sera une
aventure de l’esprit.
Analyse de Rêve (p78)
Dessin -> En bas du
dessin, on peut lire « rêve du 21 novembre
1956 », qui semble être la date de l’expérience onirique de Man
Ray. On voit un train en flamme qui
tombe sur une ville, la violence et la dureté du dessin est exprimée
grâce à la ligne plutôt horizontale du train qui casse les lignes verticales
des grattes ciel.
Poème -> Eluard reprend
l’ambiance pesante, il garde le cadre spatial de la ville « Tour
Eiffel ». Il supprime le train qui est la figure centrale du dessin mais
maintient l’idée de la destruction « penchée » « tordus » « crevés »
« maison en ruine ». Le poème semble plus être un rêve éveillé que de
l’inconscient. Il semble être dans l’impossibilité de communiquer ou d’échanger
avec les autres.
Interprétation des deux ->
Le dessin et le poème représentent l’ambiance angoissante du rêve.
Analyse de Narcisse
(p35)
Dessin → La ligne ne se
limite pas au cadre de la page = imagination
Masque qui suggère l'idée que
dans nos rêve nous sommes quelqu'un d'autre ou montre que la femme représentée
peut être imaginée et rêvée par chacun de différentes façons.
Le fait qu'elle soit nue peut
également émettre l'idée que la personne est vraiment elle-même.
Poème → Définition de
Narcisse en littérature : Homme amoureux de sa propre image / ou herbe
vivace, bulbeuse aux feuilles allongées.
Eluard reprend l'idée du
masque
Poix : mélange mou et
collant à base de résine et de goudron végétaux
« N’être que sois »
idée de n'être que sois même, sans jouer de rôle reprise du dessin de la femme
nu
Guide
« égaré » : perdu dans le rêve
Les tours du
silence :
Dessin -> On voit les
ombres sans corps.
On ne distingue pas vraiment
de cadre temporel, ce qui fait penser au monde du rêve où on ne se retrouve pas
dans le temps.
Poème -> « Ils
voudraient avoir une ombre, ils voudraient avoir un corps » → figuration
déroutante ? Reprend l'idée du dessin
« Ils sont aux mains de
l'espace » : Le rêve est contrôlé par une force extérieure et
supérieure.
« Et les pierres seront
soleil » : vikings, aide à la navigation pour trouver le soleil
(=inspiration à travers le rêve)
Eluard reprend bcp les
éléments du dessin : les mots pierres/ombres/corps/ni jour ni nuit = Le poème donne à relire le dessin
L'espion :
Dessin -> On aperçoit
un « espion » derrière la fenêtre = comportement étrange comme dans
les rêves
Assemblage d'objets
improbables et insolites
Échelle des proportions
irréalistes et démesurées = imaginaire
La main semble traverser
l'objet = image floue = rêve
Poème -> Dans le
poème, Eluard parle d'une femme qui dort « Arc parle tendu de tes yeux
fermés » = paupières → rêve
« L'épaisseur de la
vue » = rêve flou
Conclusion :
Les mains Libres est une
œuvre qui met en avant l’existence de l’inconscient. Imaginer et rêver leur
permet d'accéder à la beauté convulsive. Pour
percevoir cette beauté, nous serons donc
attentifs aux images, aux sons, aux rythmes qui parcourent ses poèmes associés
aux dessins de Man Ray, à leurs lignes, leurs traits. Même si il s'agit d'un
immense rébus difficile à élucider nous avons les mains libres pour le faire. Beaucoup
d'oeuvres traitent du sujet de l'imaginaire et du rêve qui est un des
principaux thèmes du surréalisme. Nous pouvons trouver une part de rêve dans des
œuvres tels que Le cauchemar
de Füssli ou Le Cri de Munch ou
encore La métamorphose de Narcisse de
Dali.