samedi 28 février 2015

Des exemples de compositions par des élèves : 1. Jeanne Supiot (TL1)



Question 1 : Illustration "Au Bal Tabarin"


         Publié en 1937, le recueil Les Mains Libres est le fruit de la collaboration entre Man Ray et Paul Eluard, respectivement photographe/dessinateur et poète. Ces deux artistes décident de créer, suivant de credo surréaliste qui consiste à bousculer la tradition et l'ordre établi, une oeuvre originale où ce sont les poèmes qui viennent illustrer les dessins. Le groupe surréaliste (mené par André Breton) entend réveiller notre regard, nous amener à considérer la poésie, le merveilleux qui surgit de n'importe où, même de la banalité du quotidien. Dans ce nouveau dialogue qui s'installe entre les arts se trouve aussi -et surtout- le dialogue entre deux visions du monde: Eluard, poète solaire, apollinien, rencontre l'artiste sombre, dionysiaque qu'est Man Ray. Ce dernier, selon ses propres mots, laisse ses mains rêver sur le papier, tandis qu'Eluard rêvera avec ses mots sur le dessin. Les poèmes d'Eluard ne relèvent-ils alors que de l'illustration? En quoi avec  " Au Bal Tabarin" voyons-nous qu'Eluard dépasse le caractère illustrait pour lui même exprimer ses rêves, sa vision? Comment s'expriment dans le même temps les thèmes du surréalisme?

       De nombreuses correspondances s'établissent, enter le dessin et le poème. Tout d'abord, la femme -pièce centrale du recueil- est omniprésente dans le dessin; elle est essentiellement présente par son corps, puisque l'on voit même un visage barré d'un croix (seul occurrence d'un élément barré dans Les Mains Libres). C'est donc son corps qui est important, il est en mouvement -avec les trois femmes du bas- ou bien statique et incomplet. Une et plusieurs à la fois, la femme, à la fois idéalisée et ambigüe, se retrouve dans le poème par le pronom "toi", qui peut désigner une femme en particulier pour Eluard, ou bien la femme en général, avec tous les mystères qui l'accompagnent. Les corps dans le dessins sont parfaitement proportionnés, mais démesurés entre eux: ce sont les "mesures nouvelles et fausses", les "distances" troublantes qui mélangent les plans. On ne sait quelle femme est à échelle humaine, la scène "invraisemblable" donne une impression de désordre. Man Ray utilise dans ses dessins des images tirées de ses rêves: le sujet est indéfini, des éléments se superposent, et l'on a une impression de flou avec les lignes brisées et les contours imprécis, comme dans le dessin de "L'Evidence", par exemple. Mais de cette scène imprécise se dégage aussi une atmosphère de bruit, de spectacle, qui nous renvoie au titre donné par Eluard. Le Bal Tabarin état un cabaret que fréquentaient les surréalistes. Le "rideau noir" d'Eluard est alors un référence à la scène, le "rythme" et les "mesures" une référence à la musique -prenant un sens autre que celui évoqué plus haut, ces termes illustrent alors le goût surréaliste des jeux de mots. Le "rythme sans fin" marque aussi en un sens une obsession, puisqu'il se répète à l'infini; associé à la femme et aux vers parfois très lyriques d'Eluard, on peut  penser aux battements du coeur, qui peut alors renvoyer aussi au sentiment intense d'avoir le coeur qui bat suivant la musique du cabaret. Le spectacle est figuré par toutes les femmes: elles dansent, et on a en haut une sorte de machine faite d'un buste gigantesque, rappelant les mannequins de mode chers à Man Ray. La sphère que tient la femme au visage barré contraste elle avec les robes drapées: elle est un élément moderne, par sa forme et par oppositions aux robes des danseuses, qui rappellent celles des statues antiques. Cette sphère renvoie aussi au "rideau noir" du poème. On ne peut par ailleurs pas dire d'où vient la lumière, dans le dessin: les femmes sont baignées de lumière, pour la plupart. Le dessins noir et blanc de Man Ray se trouve coloré par les vers d'Eluard, qui parle d'"anémones, mandarines, lys, pêches, boutons d'or". Toutefois Eluard interroge ces couleurs et, tout comme les femmes de Man Ray se perdent dans le blanc de l'arrière plan par leurs contours ouvert, la femme à laquelle Eluard s'adresse pourrait n'être qu'un "reflet". Cette femme irréelle, "vêtue de pluie", renvoie au motif de l'eau, que l'on retrouve aux pieds des femmes qui dansent dans le dessin. Bien que la "terre" et la "nuit" (qui renvoit à la fête, au cabaret) soient aussi présentent dans la dernière strophe, l'eau reste synonyme de lumière, d'"éclat", comme dans "Le Temps Qu'il Faisait Le 14 Mars", où "l'eau devient lumière". "La mer", ligne 5, était déjà associée à la "lumière" du vers suivant, par une construction en chiasme. Eluard investit ici une des techniques photographiques de Man Ray, la rayographie, par laquelle les objets absorbent en quelque sorte la lumière. Or le poème joue aussi sur les oppositions, les contradictions: la source normalement ne jaillit pas de la mer, et le noir masque la lumière. "Toi", la femme, transcende les oppositions, elle est omniprésente et ultime. Tout comme avec l'opposition apollinien/dyonisiaque, on retrouve une opposition "nuit"/"éclat", "noir"/"lumière". Ce sont des motifs récurrents, dont on retrouve souvent les champs lexicaux associés dans les poèmes d'Eluard, comme par exemple dans "Fil et Aiguille" où les "étoiles mortes endeuillent la vue".

     Le poème de Paul Eluard ne relève donc pas simplement de l'illustration: il est un dialogue avec les dessins de Man Ray, dans le sens où les éléments des deux se répondent, "rêvent", s'entrecroisent. Plus encore, ce dialogue est ouvert à un troisième interlocuteur, le lecteur, qui va rajouter une dimension supplémentaire à l'oeuvre.





Question 2. Sujet sur la couture :


   On peut pointer chez les deux auteurs de fortes oppositions, aussi bien dans leurs arts que dans leurs personnalités. Il est un élément cependant qui les rassemble, bien qu'il puisse de premier abord sembler anecdotique: leurs deux mères étaient couturières de métier. Tout au long du recueil, on retrouve des références, des allusions à la coutures, dans des dimensions diverses. Plus qu'un simple motif, quels aspects revêt la couture dans le recueil Les Mains Libres?


    Après le poème liminaire, le recueil s'ouvre sur "Fil et Aiguille". Le dessin représente un fil passé dans une aiguille gigantesque, elle-même plantée dans un champ devant un paysage de montagnes. Sur le sol est inscrit la signature de Man Ray, et "2 ans". Cela nous amène à penser que ce dessin est une référence à la mère de l'artiste, puisqu'il existe une photo de Man Ray enfant avec sa mère, dont la silhouette est identique à celle formée par le fil du dessin. Ce fil, d'un autre point de vue, peut représenter une fenêtre non conventionnelle vers une autre réalité propice à la création (les deux tiers de l'espace du dessin étant laissés blancs). La présence de la mère couturière est alors en quelque sorte fantomatique, "sans corps". Le fil annonce aussi le fil conducteur du recueil, l'importance du thème de la couture. La couture, les liens, le tissu (qui a la même racine étymologique que texte), sont aussi un symbole de leur collaboration, de leur amitié, desquelles va naître une nouvelle approche de l'art. Le blanc, qui occupe presque tout l'espace des deux pages (et de façons inversée/croisée) exprime le saut dans le vide des deux artistes, qui se lancent dans le "papier nuit blanche", la création, sans savoir où ils vont, sans point de repère -le fil du dessin n'a d'ailleurs pas de noeud pour le retenir. A cet aspect du thème de la couture répond le titre du poème "La Toile Blanche": les deux artistes délaisseraient le papier pour un support tissé, référence au dialogue entre les techniques et les médiums, entre les arts. A l'inverse des "passions sans corps" de "Fil et Aiguille", on a affaire dans le dessin à un manteau vide, qui se file pour former la date. Le fil est présent dans de nombreux dessins, comme dans "Le Sablier Compte-Fils", objet aussi mystique que le métronome de Man Ray, qui enserre la taille de la femme, la ceinture, quand au contraire dans le dessin de "L'Evidence" on a des fils/flammes en désordre et une ceinture qui ne serre rien.  Cette association des fils, du temps et de la couture renvoie également au poème "Le Temps Qu'il Faisait Le 14 Mars", dans lequel "les aiguille de midi cousent la traîne du matin". Il y a là encore un jeu sur les mots, les aiguilles étant à la fois celles d'un horloges et celles d'une couturière. Le fil est aussi évidemment présent dans le dessins "Les Mains Libres" (ce qui nous amène encore plus à considérer la couture comme un élément central de l'oeuvre, le poème donnant son titre au recueil): un fil, trait ininterrompu, libre, automatique. Le fil est à d'autres moments bien plus droit, organisé, comme dans le dessin de "Solitaire", et puisque le dessin de "L'Attente" fait écho à celui-ci on peut même avancer que les toiles d'araignées sont elles aussi à inclure dans le thème de la couture, puisqu'elles sont elles aussi faites de fils, que l'araignée tisse sa toile. On retrouve ces toiles d'araignées dans le poème "Le Château d'If", mais nulle part ailleurs: dans le cas contraire, et en s'appuyant sur la vision de certains qui voient dans le dessin de "Fil et Aiguille" un façon pour l'artiste de tuer la mère métaphoriquement (ou au moins de s'en détacher), on pourrait penser à un vision toxique de sa mère par Man Ray. Mais bien plus que la mère, c'est surtout la femme, idéalisée, qui est associée à la couture dans le recueil, et plus précisément au tissu, aux drapés. Il y a une récurrence de femmes vêtues de robes plissées, comme dans "L'Aventure" ou "Au Bal Tabarin", mais aussi de tissus indéfinis comme dans "Burlesque" ou "Paranoïa". Les vêtements, ou l'absence de vêtement, créent une érotique, un dévoilement total ou suggestif, voire une absence (avec les gant vide de "La Toile Blanche" par exemple), et peut-être tout cela à la fois. La femme "dévêtue" des "Sens", qui contrairement à beaucoup est représentée forte et non lascive/offerte, est l'exact opposé, le négatif même, des "passions sans corps" de "Fil et Aiguille" et des vêtements vides de "La Toile Blanche" La couture revêt aussi un aspect menaçant, avec le dessin de "La Couture" justement, où l'on voit une paire de ciseaux immense s'apprêtant à découper soit la femme soit son vêtement. Ce dessin se rapproche de "Pouvoir", ainsi que de "La Peur", avec le thème de l'homme démesuré et menaçant (ici personnifié par les ciseaux) et de la femme dans une position de faiblesse. Mais la femme est aussi inspiratrice, muse, et les drapés dont elle se vêt rappellent les représentations des muses de l'Antiquité, par exemple dans le dessins d'"Au Bal Tabarin". Un autre type de femme inspire les deux artistes: la "femme portative", le "mannequin" de mode. Le groupe surréaliste a organisé, dans la même période où le recueil est paru, une exposition dans laquelle chaque membre du groupe devait décorer un mannequin. Ce thème est aussi, tout comme celui de la mère, un renvoi à l'enfance des deux artistes, à l'atmosphère des ateliers de couture. Dans "Le Mannequin" (le dessin reprenant une photo de mode de Lee Miller, compagne de Man Ray, à la pose très artificielle ici), cette femme irréelle est vue par Eluard comme le "premier amour de l'écolier". Or on ne sait si ce premier amour, cette fascination enfantine, s'exerce sur un mannequin de magasin, idéalisation de la femme, ou sur la vision qu'a le poète de sa mère durant son "enfance", modèle fascinant, "unique guirlande tendue", unique guide. La couture est à nouveau associée au lien entre les arts et les individus, puisqu'elle est le symbole d'une "suppression des distances". Si l'on retourne à l'atmosphère de l'atelier de couture, on peut aussi évoquer le poème "Objets", dans le dessins duquel on a un drapé imprécis, ainsi que ce qui s'apparent à un rouleau de tissu. On peut aussi évoquer le poème "C'est Elle", dont le titre pourrait renvoyer clairement à la figure maternelle, renforcé par la présence du mannequin. Le mannequin est ici un jeune homme, étonnement, alors que la couture et le tissus sont habituellement associés aux femmes dans le recueil. Mais ce mannequin est affublé d'un soutien-gorge, ce qui entraîne une confusion, une interrogation.

     Les dessins et poèmes de Man Ray et Eluard pourraient être interprétés à l'infini, dans toutes les directions. Quel que soit le motif, il prend son sens et s'étoffe au fil des lectures, des interprétations nouvelles, et nous renvoie toujours à de nouvelles pistes, de nouveaux thèmes, de nouvelles visions des intentions des auteurs. Man Ray et Paul Eluard auront réussi leur pari de réveiller notre regard.





Exposé : Les lieux dans l'oeuvre par Edmée Triaux, Delphine Barhi Murad et Anissa Bien (TL2)


Les Mains Libres , Man Ray & Paul Eluard
Les Lieux


INTRO :
Les Mains libres, recueil de Man Ray et Paul Eluard paraît en 1937. Il est constitué de dessins illustrés de poèmes. Ce recueil est une parfaite illustration de la démarche et des recherches des Surréalistes qui refusent les catégories esthétiques et qui envisagent l’art comme un instrument de libération et de révolution.
Dessins et poèmes font référence au rêve et à l’activité inconsciente. Quelques mots parfois suffisent au poète pour illustrer l’image.

 La nature
La glace cassée (I) ; Les mains libres (I) ; Main et fruits (I) ; Le temps qu’il faisait le 14 mars (I) ; Plante-aux-oiseaux (I) ; La plage (I) ; Paranoïa (I) ; Des nuages dans les mains (I) ; Feu d’artifice (I) ; Où se fabriquent les crayons (I).

c. Les paysages
Paysages seuls ou arrières plans sont présents dans 20 dessins. Les châteaux forts, crénelés, les ponts, les plages, les ports sont les plus fréquents. Quelques dessins de centre-ville complètent cet inventaire. Les plantes sont aussi un motif présent, parfois en pot, parfois démesurées, parfois plus réalistes. Les animaux sont rares, on trouve quelques représentations d’oiseaux, quelques poissons, un serpent géant.


I/ : A – Un espace-temps déréalisé et onirique.

Beaucoup de dessins du recueil sont consacrés à des lieux, des paysages et beaucoup de poèmes font référence aussi à des lieux mais pas forcément visibles ou clairs mais tous traduisent cette volonté paradoxale d’exprimer le monde tel qu’il est tout en faisant appel à l’imaginaire => ce sont des « lieux » au sens de Bonnefoy qqs années plus tard, autrement dit un espace rêvé qui à partir de l’espace perçu exprime à la fois l’insatisfaction, l’espoir, la crédulité, le départ, la fièvre… => une sorte de représentation symbolique de l’infini et de l’éternel inclus dans l’ici et le maintenant. - Des lieux irréels et fantasmés : * Des « images-tableaux » (Maryvonne Meuraud) : beaucoup de dessins de MR ont une ambition réaliste ms il rajoute très souvent des éléments surprenants et insolites voire fantastiques et ce sont ces éléments qui retiennent l’attention d’E et conditionnent son illustration = une illustration qui répugne donc la logique linéaire du discours et qui passe davantage par des images essentiellement visuelles, des « images-tableaux » => poèmes qui deviennent alors une suite de notations brèves et d’images fondées à la fois sur la richesse sonores des mots (signifiants) et sur la diversité sémantique (signifiés) : ils mettent en valeur ce que connotent les dessins de MR plus que ce qu’ils dénotent. EX : « Le Château d’If » (94) : il traduit déjà le caractère massif du bâtiment « grande maison » avec un aspect d’ailleurs théâtral car « décorés » et « toiles » renvoie à cette scène de théâtre mais le mot « araignée’ apporte la connotation de négligence, d’abandon voire de vide + vide marqué par les allitérations en [k] ou assonance en [o] => signifiant et signifié se rejoignent ici et le mot se réfléchit dans les sonorités qui le redoublent en un effet spéculaire sous-entendu d’ailleurs ds le dessin avec ce personnage vaniteux et narcissique.  poème s’accorde au dessin d’un lieu à partir des images mentales que celui-ci peut engendrer.




Le lieu comme image mentale :

des lieux assez surnaturels peuplés souvent de fantômes, d’ombres, de silhouettes féminines, des animaux étranges ds les dessins comme le serpent, des oiseaux => aspect premier est celui du rêve et de l’imagination et c’est cet aspect onirique du lieu que privilégient E = c’est d’ailleurs un lieu poétique en soi ds la mesure où c’est un appel vers un au-delà inconnu, comparable au rêve. EX : « Le Tournant » (59) : poème qui ne décrit rien du dessin, pourtant le verbe « espérer » évoque la promesse d’un ailleurs où se dissimule un être fabuleux dont la main gigantesque enserre une falaise anthropomorphe, idem : la main est peut-être une projection de ses propres désirs érotiques inavoués, l’image mentale de « ce qui est interdit » => par le lieu extérieur, le poète traduite une disposition psychologique, un aspect de son intériorité et donc le poème prolonge alors le dessin en lui donnant une profondeur.

Le lieu comme symbole :

image du « paradis livide » conférée par E à propos du ciel donne dimension symbolique aussi bien ds les dessins de MR que dans les poèmes d’E = image de l’Eden et de la Chute qui est suggérée par le dessin de la page 42 qui met en scène un couple nu sous une rose dont l’épine rappelle le caractère menaçant. Idem pour le poème qui, sans fr appel au paradis perdu, évoque un univers riche et fécond où tout prolifère + idée de genèse très fréquente ds le recueil : souvent vue comme un moment de fusion entre les quatre éléments comme dans « La Plage » (82) et « Histoire de la science » (81) --> ensemble des lieux chez Eluard et aussi chez MR évoque l’histoire de l’homme en général et les grandes étapes de notre civilisation avec la Grèce ancienne ds « L’Aventure », le M-Â avec les dessins de château, l’époque moderne avec « La Liberté » et sans compter « La Marseillaise » (98), titre donné par E comme une référence à l’hymne révolutionnaire  presqu’un engagement des artistes qui souligne la nécessité d’agir et de se guérir de la plaie mortelle de la solitude et des poèmes d’ouverture au monde et à l’autre…


Ex : le poème le tournant
a. Description
C’est un paysage réalisé au crayon.

Au premier plan se déroule une 
route de montagne, dessinant un grand tournant orienté vers la droite, et soutenue par un haut mur maçonné, pourvu de grandes arches.

Sur la droite du dessin, l’artiste a représenté le pan de la montagne surplombant la route, avec, à son sommet, quelques 
arbres faméliques.

Presque à la jonction de la montagne et de la route, 
une énorme main enserre la roche. On ne distingue que les phalanges, la paume et le bras qui sont cachés derrière le virage.

Au second plan, figurée en contre-bas de la route, une 
maison, dotée d’une tour, est lovée dans ce qui semble être une forêt.

L’arrière-plan représente 
une baie au bord de la mer et un ciel nuageux
b. Un lieu
Ce dessin est vraisemblablement la représentation de la baie de Nice, vue de la grande corniche en venant de St Jean Cap-Ferrat.



Le poème peut résonner dans le dessin, en désignant la route, qui tourne et va à la rencontre du corps de cette main, comme une métaphore du rêve, de l’hypnose, de la psychanalyse, qui permet de découvrir ce qui était jusqu’alors interdit.





Château : 


Annie Le Brun a mis en évidence (Les Châteaux de la subversion, « Folio essai ») l’importance du château ans la littérature noire depuis la fin du XVIIIe siècle, lieu de l’enferme-ment, du fantasme à l’intérieur de soi.
Les surréalistes, grands amateurs de Sade, ne peuvent que souscrire. Ici quatre châteaux (« Les tours du silence », « Le château d’If », « Château abandonné », dont un très explicitement érotique, « Les tours d’Éliane », qui ne joue cependant pas sur l’enfermement de la femme mais fait de son corps une forteresse difficile à conquérir : « Un espoir insensé / fenêtre au fond d’une mine ». Notons que Breton, cité par Eluard dans Poésie intentionnelle, avance cette formule : « UN CHÂTEAU A LA PLACE DE LA TÊTE ». La forteresse métaphorise en effet l’espace dans lequel sont enfermées les images et les possibilités sadiennes du désir.


Conclusion
Comme on a pu le voir précédemment les lieux on une importance aussi grande ou égale a plusieurs éléments dans cet œuvre tel que la couture , la femme ou encore les rêves . Chaque lieu a une signification particulière , ils n'ont pas était choisis au hasard.

Exposé : Sade et son influence sur "Les Mains libres" partie de Camille Rondeu (TL2)

SADE ET SON INFLUENCE




INTRODUCTION :

Le Surréalisme est un mouvement artistique révolutionnaire du XXème siècle. Celui-ci a pour but de libérer la société de l'emprise de la morale chrétienne, dans laquelle elle est enfermée. C'est ainsi qu'Eluard et Man Ray publient, en 1937, le recueil de poèmes et de dessins Les Mains Libres. Ce dernier se détache de la tradition puisque c'est le texte qui illustre les images, et non l'inverse. Cette œuvre se veut être l'expression de l'inconscient, des fantasmes et des désirs. C'est en ce sens que les surréalistes admiraient le Marquis de Sade. Ainsi, dans quelle mesure le recueil Les Mains Libres est-il une œuvre inspirée de celle de Sade ?


I – QUI ETAIT LE MARQUIS DE SADE ? POURQUOI EST-IL L'INICIATEUR DU « SADISME » ?

a) Le personnage

Nom : Donatien Alphonse François
Titre : Marquis de Sade
Date de naissance : 1740
Date de décès : 1814
Profession(s) : Écrivain, philosophe
Religion : Athée, comme il le montre dans son œuvre Dialogue entre un prêtre et un moribond (1782), et dans toutes celles qui suivront.

« Dieu est absolument pour l'homme ce que sont les couleurs pour un aveugle de naissance, il lui est impossible de se les figurer. »
(Marquis de Sade / 1740-1814 / Pensées)

« Un de mes plus grands plaisirs est de jurer Dieu quand je bande; il me semble que mon esprit, alors mille fois plus exalté, abhorre et méprise bien mieux cette dégoûtante chimère. »
(Marquis de Sade / 1740-1814 / La Philosophie dans le boudoir / 1795)

Autre : Libertin

« Oui, je suis libertin, j'ai conçu tout ce qu'on peut concevoir dans ce genre-là, mais je n'ai sûrement pas fait tout ce que j'ai conçu et ne le ferai sûrement jamais. Je suis un libertin, mais je ne suis pas un criminel ni un meurtrier. »
(Marquis de Sade / 1740-1814)

Né dans une famille aristocratique.
A 14 ans, il entre dans une école militaire dont il ressort capitaine, et retourne à Paris en 1763.
Il fréquente des actrices et des courtisanes, ce qui montre son goût pour la luxure.
Cette même année, en 1763, et peu de temps après son mariage, il est emprisonné pour « débauche outrée ».
En 1768, il est de nouveau emprisonné pour « flagellation ».
En 1772 il est accusé d'avoir empoisonné une prostituée à qui il a donné des dragées soit disant aphrodisiaques. Il est condamné à mort par contumace, c'est-à-dire à l'issue d'un procès sans lui, puisqu'il était en fuite à ce moment-là.
Il est arrêté, mais s'évade et est finalement retrouvé. Il est donc arrêté sous lettre de cachet du roi Louis XV.
En 1777, il se trouve incarcéré dans le donjon de Vincennes, où il rédige le Dialogue entre un prêtre et un moribond.
Durant cette période, Sade écris pour échapper à l'ennui.
Il est libéré en 1790 par la Révolution française, puisque le roi étant destitué, ses lettres de cachet n'ont plus aucune valeur. C'est à ce moment qu'il écrit les pétitions les plus antireligieuses, puisqu'il prône, au côté des sans-culottes, un État communiste bannissant tous les prêtres.
Ses deux fils émigrent et sa femme obtient la séparation à cause des violences conjugales que lui fait subir le marquis.
Il se retrouve ruiné et essaie de gagner sa vie en faisant jouer ses pièces de théâtre.
En 1793, il est de nouveau condamné à mort mais échappe à la guillotine à cause d'une erreur administrative.
En 1801, il est encore une fois arrêté car ses écrits sont considérés « outrageux » et dotés d'une extrême « violence pornographique ». Il est donc interné à l'asile de Charenton. Il y reste jusqu'à sa mort, même s'il était tout à fait lucide. Il aura donc fait près de vingt ans de prison.

Le marquis de Sade maîtrisait parfaitement la langue française et alternait scènes pornographiques et dissertations philosophiques dans ses œuvres.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle elles ont longtemps étaient censurées et « diabolisées » par l’Église. Elles ne seront réhabilitées qu'au XXème siècle.
A cette période, on ne se concentre plus sur le « sadisme » et la pornographie, mais plutôt sur la critique de l'hypocrisie de la société que réalise Sade à travers ses ouvrages.
Il défend les vices au nom de la nature.
Son imagination est perçue comme l'envie de libérer l'Homme de ses contraintes.
C'est un des grands écrivains et philosophes français allant jusqu'au bout de sa pensée, sans se préoccuper des conséquences qu'elle engendre.

Extrait de l'article « Sade, ou le plus athée des athées. », paru dans L'Humanité le 24 août 2009, et écrit par la romancière Lydie Salvayre.


b) Son œuvre


Pour découvrir quelques œuvres de Sade, en version intégrale :

  • La nouvelle Justine
  • Histoire de Juliette
  • Les 120 journées de Sodome

  • Augustine de Villeblanche
  • L'instituteur philosophe

D'autres textes de Sade, références de sites sur sa biographie, réflexions sur son œuvre...


La majorité de l’œuvre de Sade a été réalisée durant ses années de prison à Miolans (1772-1790), La Bastille (1793-1794) et Charenton (1801-1814). Elle exprime les contraintes qu'il a subies tout au long de sa vie, et est un moyen de résister contre celles-ci. Dans le fond, l’œuvre de Sade n'est pas organisée autour de la sexualité, mais comme bouleversement de la société de l'époque et de son ordre social. En somme, le libertinage de Sade est un moyen de rompre avec les normes et les valeurs collectives imposées par le système de l'Ancien Régime, de la Terreur et de la période Napoléonienne.

Il casse les les idéaux religieux, idéologiques, moraux et sociaux.
A travers ses œuvres, Sade montre ce qu'il ne faut pas dire.
Il remet en cause les limites de la société, de ses mœurs et du corps.
Les thèmes principaux sont la violence, la sexualité, la religion...


Le supplice d'Augustine dans Les 120 journées de Sodome :

La découverte de l’œuvre sadienne se fait au Xxe siècle, par le biais des surréalistes, portant leur attention sur l'imagination.

L’introduction d’Encre de sang revenait déjà sur cette entreprise de réhabilitation qui vise à faire oublier les « crimes » de Sade (p. 9) :
« Que les surréalistes aient cherché à tout prix à relativiser les crimes commis par Sade, que les penseurs de la Modernité se soient désintéressés de sa biographie, ce sont des faits indéniables. Il est certain aussi que le marquis de Sade viola, blessa, peut être même tua […]. Mais qu’est ce que la criminalité probable sinon avérée de Sade change quant à la possibilité et à la manière de lire ses œuvres ? »



Une vidéo sur Annie Le Brun, iniciatrice de l'exposition « Sade. Attaquer le Soleil. »


Commentaires expo sur Sade

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Exposé : Le Désir et ses pièges par Alexia Boyou et Lola Ducouret (TL2)

Le désir et ses pièges 

1. Le désir évoqué par la femme.
1. Dans les dessins, femme omniprésente.
2.Dans les poèmes, cachée mais bien là.

2. Ses risques et ses pièges.
1. Les risques pour le poète.
2. La femme désirée mais dangereuse.

Problématique : Dans quelle mesure le désir et ses pièges rythmes t'ils l'intégralité des Mains Libres ?

Intro :  Dans ce recueil les dessins  paraissent simples, enfantins, parfois. Comme sont simples les mots de Paul Eluard qui a illustré avec des poèmes les dessins de Man Ray avec des verres qui expriment clairement la recherche de la femme, de la fusion dans l'amour et du désir. Le désir engage nécessairement deux êtres. Il est une projection de soi sur l’autre et la nécessité de combler un manque pour parvenir à une forme de bonheur, qui passe par la présence de l’autre. Le désir vient de la volonté de retrouver une unité perdue. Dans ce recueil c'est d'un double désir qu'il est question, celui du dessinateur et celui du poète. Aucun voile de pudeur ne recouvre le dessin, ni n’atténue les mots, le désir érotique est clairement exprimé. Le corps devient « un objet » à étreindre, à posséder. Ceci est renforcé par la présence du dessin qui souvent se montre encore plus explicite. Dans Les Mains libres, la plupart des dessins de Man Ray représentent des femmes nues et des visages marqués par le désir ou dévoilant un sein (Cela représente 24 dessins sur 36).
Dans le premier texte page 9 que Paul Eluard écrit à propos de Man Ray, il fait apparaitre les dessins de celui-ci comme des évocateurs du désir. Comme si le seul but de Man Ray était de faire ressortir la beauté qu'il y a en toutes choses. (lire le texte)

1. Le désir évoqué par la femme. 
1.Dans les dessins, femme omniprésente.

La femme est représentée à 34 reprises dans les dessins de Man Ray, le plus souvent nue, dans des positions d'offrande les yeux fermés.


  Comme par exemple dans Le Don  page 26, où le corps de cette femme prend l'ensemble de l'espace. Cheveux en arrière buste en avant, les yeux clos,  elle s'offre entièrement à nous, ses cheveux longs qui tombent dans son dos évoquent la liberté d'une cascade. Ce dessin est chargé d'érotisme, d'abord puisque cette femme est nue et ensuite puisque qu'elle est dans une position de vulnérabilité complète. 

Egalement dans Pouvoir page 67, où cette immense main d'homme qui empoigne le corps de cette femme nue évoque le désir brut. Puisque que c'est comme si cette main désirait énormément ce corps et maintenant qu'il le tenait n'était pas près de le laisser s'enfuir. On peut deviner que cette main est crispée grâce aux veines qui ressortent du poignet et que cette femme dont on ne distingue que le bas du visage est dans l'impuissance de faire quoi que ce soit pour se sortir de son étreinte. Elle lève d'ailleurs les bras en signe de soumission. 

Enfin dans Le Désir page 20, cette femme n'est cette fois pas nue mais pour le peu qu'on distingue de son habit elle semble assez richement vêtue. Ses traits sont fins et sérieux et elle semble regarder quelque chose au loin. Le désir est évoqué dans ce dessin encore une fois par la présence de la main d'un homme qui attrape les cheveux de la femme. Il y a une opposition entre la délicatesse de la femme insensible et la violence de la main crispée, brutale et impatiente de l'homme qui ne paraît pas capable de contrôler son désir pour cette femme. 


2. Dans les poèmes, cachées mais bien là.


Dans le poème L'Attente page 92, les araignées sont absentes du poème d’Éluard mais suggérées par le dessin. Comme l’araignée tisse patiemment sa toile, le poète intitule le couple du dessin et du poème L’attente, suggérant la patience bien sûr, mais aussi la nostalgie et la mélancolie. Aux dix fils tendus par les mains à partir desquels se tisse la toile, il n'y a qu'un seul vers, un alexandrin, qui à lui seul exprime le sentiment produit par le dessin. Ces mains qui dans Pouvoir étaient prédatrices et tenaient un corps de femme, ne tiennent dans L’attente qu’une toile d’araignée : le désir n’a pas pu être satisfait, l’araignée qui guettait sa proie n’a rien attrapé. 

Dans l'Evidence page 17, le début de la première strophe semble parler de la nature jusqu'à ce que le poète s'adresse directement à quelqu'un avec "joignent tes yeux" et ensuite avec " toi tu gardes ton équilibre". Après avoir relu ce poème il m'apparait comme un éloge à une femme mystérieuse et forte. Objet encore une fois du désir du poète.

Aussi dans le Don page 26, Eluard utilise le pronom "elle" donc on se doute qu'il parle d'une femme mais à y regarder de plus près il y a un érotisme caché dans ce poème. Puisque le sexe de la femme est évoqué avec "figue" et "fille noir". La femme apparait comme un objet de désir suprême que le poète compare au soleil avec "elle est le plein soleil sous mes paupières closes".


2. Ses risques et ses pièges. 
1.Les risques pour le poète.

Le poète prend de grands risques pour lui-même en se laissant aller à ce désir pour la femme comme nous le montre ces poèmes : 
Dans Solitaire page 49, deux mains entrelacent un fil, le thème de la solitude est omniprésent, source d’angoisse dans toute l’œuvre du poète. Si dans le dessin, les deux mains pouvaient suggérer l’isolement et la solitude, il s’agit de deux mains de femme mais dans le poème, l’adjectif « solitaire » qualifie le poète, confronté à la solitude, à l’absence de la femme aimée, celle dont il risque d’être séparé. Le poème est une sorte de dialogue à la fois avec la femme aimée, « toi », mais surtout avec lui-même, c'est un dialogue sur la relation amoureuse.

Dans La mort inutile page 65 le poète reproche à la femme aimée de l'avoir écarté des autres, de l'avoir écarté de sa création. Il utilise "mauvaise" pour la définir. La femme apparait dans ce poème comme une créature dangereuse et destructrice qui peut être fatale au poète et à son talent. La femme n'est plus supérieure, elle est réduite au rang de victime. 

2. La femme désirée mais dangereuse.

 Pour les surréalistes, la femme peut être vue comme une muse mais aussi comme une créature beaucoup plus dangereuse et fatale :

Par exemple dans La Marseillaise page 100, Eluard la décrit dans son poème comme une femme mauvaise qui cherche à séduire les hommes grâce à ses charmes, hommes qui sont considérés comme des proies. Cette femme fait bien évidemment référence aux sirènes de la mythologie qui cherchaient à attirer les matelots par leur beauté et leurs chants afin de les faire chavirer et de les noyer. La femme apparait alors comme un monstre usant de ses atouts et plus comme un mystérieux objet de désir. 

Egalement dans Brosse à cheveux page 108, Eluard semble mettre en garde les hommes ou le lecteur sur la femme. Quand il dit "méfiez-vous des teintures idéales" cela fait référence aux cheveux des femmes, cheveux non représentés sur le dessin d'ailleurs. C'est comme si Eluard avait explicitement dévoilé les intentions mauvaises des femmes et les risques qu'encouraient les hommes qui se laisseraient séduire. Quand il dit "Prenez exemple sur moi" c'est comme si il partageait ca propre expérience avec nous.  Tout est suggéré dans ce poème mais rien n'est vraiment exprimé.



Conclusion : Le désir est donc l'un des principaux thèmes de cet ouvrage. Dans chaque dessin il est suggéré et dans chaque poème il est présent. La femme, principale objet du désir et omniprésente tous le long du livre et nous apparaît quelques fois soumise, quelque fois en position d'offrande mais aussi dangereuse et redoutable. Ce livre montre bien la fascination qu'avait les surréalistes pour la femme et la valeur qu'ils lui apportaient. Les Mains Libres est donc une succession de poèmes et de dessins faisant d'abord l'éloge de la femme mais ensuite son procès en la réduisant à une créature qui peut être fatale à l'artiste.